Exposition des portraits des femmes Prix Nobel de la Paix
dans le cadre de la  7ème édition du Women's Forum
qui se tiendra à Deauville du 14 au 16 octobre 2011
" Les festivals ou l’art du management "
Derrière la multitude des festivals d’été se cachent des femmes et des hommes de passion, des enjeux de notoriété et des intérêts mis au diapason.

Comme certains de ces coreligionnaires qui partagent son goût de la scène et des rencontres, Jacqueline Franjou brasse des idées et des fonds financiers. Le succès confirmé du festival « Théâtre et variétés » de Ramatuelle, créé avec Jean-Claude Brialy et dont elle est, depuis 21 ans, la présidente, fait de cette femme entrepreneur, l’archétype du manager passionné par les arts. Celle qui multiplie les rendez-vous culturels, de Saint-Raphaël à la Seyne-sur-Mer (1), prouve que l’on peut gérer un festival comme une entreprise d’exception, en respectant une déontologie culturelle et en s’attirant le parrainage de mécènes privés.
Jacqueline FRANJOU
« Trouver un équilibre entre le mécénat et les subventions »

Comme la plupart des festivals, locomotives du « spectacle vivant », le « sien » fonctionne sur la base d’une association loi 1901. A ceci près qu’elle n’emploie pas de bénévoles mais salarie une équipe de 85 personnes pour les douze soirées de représentation. Les présidents, eux, ne sont pas payés mais sont civilement, pénalement et financièrement responsables, ce qui crée une réelle pression et une nécessité de ne jamais désarmer devant l’obstacle. Celui de l’équation économique, d’abord, qu’il faut savoir résoudre savamment. Aujourd’hui, les festivals sont assommés par une fiscalité lourde. « Les droits SACEM, renchéris certains soirs de droits de mise en scène se doublent de la taxe parafiscale, et là, déjà, c’est entre 12 et 13% des recettes de notre festival qui s’envolent, sans compter la TVA et l’IFA (2) », note Jacqueline Franjou qui insiste sur la nécessité de trouver des financements d’équilibre, en jonglant entre le mécénat, le sponsoring et les subventions institutionnelles. Derrière ce vœu apparaissent les disparités de fonctionnement entre les « gros » festivals, comme ceux de Ramatuelle, de Vence ou de Six-Fours, qui reçoivent le soutien d’entreprises et de partenaires privés, et une majorité de petites structures qui ne vivent que de l’aide publique et de leurs ressources propres (adhésions à l’association, entrées au spectacle, ventes de boissons…)

Des lieux de culture et de rencontres

Comme en Bretagne, qui est, après la région PACA, la deuxième terre festivalière de France, les manifestations d’été sont un moteur de l’économie locale. Il s’agit d’une réalité bien comprise par le Conseil général du Var qui, avec le label « Var Estival » sélectionne une trentaine de festivals de qualité pour permettre au département de gagner en notoriété. Moins chers que le recours à une agence de communication, ces événements sont un bon point pour l’image d’une commune, d’un département ou d’une région tout entière. « Ce sont des lieux de culture, mais aussi de rencontres, avec les administrés, avec des personnalités, avec des industriels ou des personnes de « réputation ». Il faut jouer cette carte-là, avec raison, s’accorde Jean-Yves Estrade, directeur de la communication au Conseil général. Les présidents de festival doivent se penser comme des agitateurs d’idée, d’intentions et de projets ».
Reste qu’aucun festival, qui doit respecter pour son appellation, les critères de durée (2 jours minimum) et de récurrence, n’est conçu à des fins mercantiles. L’investissement est ailleurs. « Quand on crée un festival, c’est très lourd et donc, ce n’est jamais anodin, explique Jacqueline Franjou. On le fait pour « distribuer » de la culture, d’abord, pour promouvoir, dans certains cas, la création et puis pour développer économiquement la région ». Pour s’exporter enfin, car tous ces événements ont vocation à tourner en France et, au nom de la liberté, à dépasser les frontières dans une réflexion plus européenne.
Et l’avenir de ces festivals, qui passerait par le développement du mécénat privé (3)? « C’est en soi une très bonne chose, conclut Michel Koch qui dirige à Paris l’association « culture et management » et multiplie les réseaux en France. Dans le club, nous sommes tous des anciens des écoles de commerce qui travaillons maintenant dans la culture et qui voulons prouver qu’il existe une bonne entente entre la démarche entrepreneuriale et la passion pour les arts ». C’est peut-être ça, être un « spectateur engagé ».

Wendy BOUCHARD


(1) Jacqueline Franjou a créé et préside également : L’œil-en-Seyne (festival photos à la Seyne-sur-Mer) et L’œil à la plume (festival de photo journalisme à Saint-Raphaël)
(2) IFA : Impôt forfaitaire annuel, que les festivals paient même s’ils sont déficitaires
(3) Les versements faits par les entreprises à des festivals organisés par des associations ou des personnes de droit public permettent une réduction d’impôt de 60% du montant des dons dans la limité de 5/1000 du chiffre d’affaires